Nathalie Peraro, ingénieur méthodes et performances chez Veolia, basée en région PACA, est partie deux semaines en mission en République démocratique du Congo (RDC), missionnée par la Fondation pour appuyer Médecins Sans Frontières (MSF) sur le terrain. Un retour sur le terrain pour une ancienne militaire habituée à l’international.
Vous avez passé cet été quinze jours dans le Sud-Kivu, à l’est de la République démocratique du Congo (RDC). Quelle était votre mission ?
Nathalie Peraro : Notre objectif était de déployer deux Aquaforces 2000 et de former des personnels d’ONG à leur exploitation. Avec mon binôme Jocelyn Fillion-Nicollet (Veolia Eau Ile-de-France), on a encadré quatorze personnes, principalement issues de Médecins Sans Frontières, pour qu’elles puissent opérer les stations de potabilisation de l’eau. Comme souvent dans les formations, il faut s'adapter à différents niveaux d'intérêt, de connaissances, avec, nous concernant, un seul objectif : que le plus grand nombre soit autonome, après notre départ, pour produire de l'eau.
Vous avez été formée au déploiement des Aquaforces un an auparavant, et la production d'eau potable n'est pas votre cœur de métier. Le déploiement de la station s'est déroulé sans difficulté ?
NP : Les manuels facilitent grandement la prise en main. Et puis on se remet dans le sujet assez vite avec les apprenants jusqu'au moment où l'eau coule, traitée, potable. C'est un moment assez magique, émouvant : on est tous très heureux de partager... un verre d'eau !
Vous avez déjà connu le terrain lors de votre première vie professionnelle dans l’armée de l’air. Etait-ce très différent ?
NP : J’ai participé à beaucoup d’opérations extérieures (Opex) pendant mes 27 ans dans l’armée et j’ai retrouvé, dans ce contexte particulier d’intervention humanitaire, une double exigence commune de rigueur et de souplesse. L’organisation est naturellement différente avec une ONG, mais les consignes de sécurité sont claires et sans discussion : checks, couvre-feux, respect des autorisations de déplacement. Et côté souplesse, il faut s’adapter à des aléas quotidiens, avant la mission pour ce qui est d’affiner la date du départ, puis sur le terrain quand les Aquaforces sont bloquées en douane ou quand de nouveaux candidats à la formation se présentent. Globalement, on est très encadré par Médecins Sans Frontières, très intégré à leurs équipes, et en lien constant avec les permanents de la Fondation. L'humanitaire est d’ailleurs un secteur passionnant à découvrir : très structuré, tendu vers l'efficacité, assez séduisant !
L’organisation pour quitter son travail et sa famille pendant quinze jours a-t-elle été simple ?
NP : La mission, c’est aussi un effort pour notre hiérarchie, en France. Parce qu’il faut accepter l’absence de son collaborateur sur un temps de travail. Comme la mission tombait en août, pendant des périodes, a priori, de congé, je me suis organisée pour ne pas enchaîner trop d’absences après la mission. Et j’avais anticipé tout ce qui pouvait l’être. A la maison, mes enfants sont grands, donc pas de difficulté, mais un peu d’inquiétude de leur part quand ils ont compris où je partais.
Justement, sur le terrain, est-ce qu’on perçoit ce contexte très particulier de populations déplacées à quelques kilomètres d’une ligne de front ?
NP : Je m’attendais à ce type de situation, mais il est certain que lorsque vous traversez un camp de déplacés qui s’étend à perte de vue, c’est assez vertigineux. On détourne le regard pour ne pas être voyeur, on sait que ces centaines de milliers de personnes ne rentreront sans doute pas chez eux et tentent de survivre. Notre mobilisation, qui peut paraître peu de chose, est d’autant plus nécessaire. Au retour de mission, on se dit modestement qu'on a apporté une petite pierre à l'édifice.