Vous êtes parti très vite après la catastrophe. Avec les personnels des différentes Croix-Rouge mobilisées, vous avez fait partie des premiers humanitaires à arriver sur place...
Cédric Thévenot : Oui, en tant que membre des ERU (Emergency Response Unit) de la Croix-Rouge, je suis régulièrement sollicité pour partir en première ligne. Et à vrai dire, j’aime ça ! Il y a bien sûr une forme d’adrénaline pour être au plus vite utile pour les populations touchées, et en même temps il faut gérer des phases d’inertie, le temps que tout le monde s’organise et se coordonne alors même que les gens sont dans le besoin. Ce sont quelques heures, des demi-journées, mais face à la population désemparée et choquée par ce qui vient de se passer, c’est toujours difficile.
Concrètement, un avion-cargo est arrivé 24h après nous, on a déchargé le matériel et identifié un entrepôt de stockage. Parallèlement, les ONG tentaient de qualifier les besoins, de hiérarchiser les priorités, ce qui n’a rien d’évident quand bon nombre de zones sont encore inaccessibles. Bref, c’est une atmosphère très particulière.
L’ampleur de la catastrophe était-elle perceptible dès les premiers jours ?
CT : Non, parce que le territoire touché est très vaste et que la plupart des routes sont restées impraticables les premiers jours. On ne disposait que d’un ou deux hélicoptères. Les questions logistiques ont pris le dessus : comment se déplacer, transporter le matériel… Il fallait trouver des véhicules, des chauffeurs… Et puis vous avez parfois de bonnes surprises comme lorsque nous sommes tombés sur 5 000 m3 d’eau potable stockés par l’opérateur local depuis que le réseau de distribution était hors-service. Cela a permis d’organiser du water-trucking pour délivrer cette eau à la population.
Savoir où produire de l’eau, dans ce contexte, n’est pas évident...
CT : Comme il fallait gérer le flux des blessés qui allaient arriver et la flambée épidémique de choléra que craignaient toutes les ONG, la priorité est allée aux centres médicaux. Nous avons installé des unitées de traitement d’eau et du stockage d’eau potable ainsi que des latrines auprès des hôpitaux et dans des camps provisoires dédiés à la population touchée par le cyclone.
Partir en mission quasiment du jour au lendemain demande de l’organisation personnelle et professionnelle. Comment avez-vous géré ?
CT : A la station du Doubs où je travaille, j’ai la chance d’avoir un collègue, Mickaël Pannard, également volontaire Veoliaforce, avec qui nous sommes très solidaires. Quand l’un part, l’autre s’assure que tout se passe bien dans l’équipe. Et chez moi, depuis 10 ans que je suis ERU et près de 15 ans volontaire Veoliaforce, ma famille sait que je suis susceptible de partir du jour au lendemain ! Et l’avantage, c’est qu’avec deux enfants, la vraie vie recommence très vite à votre retour...